La protection sociale au Maroc se caractérise en général par la faiblesse de la population couverte (moins de 30%), par la lenteur des réformes et par une certaine inefficience.
Le Matin" du 18/01/2016 Point de vue de Saâd Taoujni
Faiblesse de la population couverte
Malgré les nombreuses réformes annoncées (AMO, Ramed, etc.) et une croissance économique relativement stable ces deux dernières décennies, le nombre de personnes couvertes par l’Assurance maladie obligatoire demeure insuffisant : le quart seulement de la population marocaine. Les estimations les plus optimistes ne dépassent guère les 30%. Pour améliorer le taux de couverture, la tendance consiste à y inclure les bénéficiaires du Ramed pour atteindre 60 ou 65% de la population marocaine. Or le Ramed est un régime d’assistance médicale où il n’y a pas de prise en charge, de tiers payant, de remboursement de soins dans le secteur privé, etc. La carte du Ramed a simplement remplacé le certificat d’indigence. Dans les faits et jusqu’au 31 décembre 2015, de nombreuses catégories de la population marocaine sont laissées à la marge du système marocain de protection sociale. D’abord, les travailleurs non salariés : les professions libérales (médecins, avocats, architectes, notaires, etc.), les commerçants, les travailleurs indépendants, le personnel de maison, etc., ne sont pas couverts. La non-affiliation a toujours été justifiée par la difficulté pour la CNSS de déterminer les revenus de cette catégorie ne bénéficiant pas d’un salaire. Le Maroc s’est privé ainsi des contributions d’une catégorie de la population ayant de meilleurs revenus que les salariés et avec lesquels une certaine solidarité et mutualisation pouvaient s’opérer dans l’intérêt du régime de sécurité sociale du secteur privé et de ses assurés. La protection sociale n’est pas qu’un centre de coûts. Elle créé des emplois et participe à l’essor de l’activité économique et sociale du pays en améliorant la qualité de vie de ses citoyens et, par conséquent, de ses entreprises.
Lenteur des réformes juridiques et institutionnelles
Début 2016, l’annonce de l’extension de la protection sociale (dans un premier temps) aux professions libérales est à saluer tout de même, mais à condition que les décrets d’application soient publiés rapidement. Les autres catégories de travailleurs non salariés devraient attendre malheureusement encore quelques années.
Une certaine inefficience
Il existe de nombreux organismes d’assurance maladie, mutuelles, caisses internes, etc. disposant de statuts, de structures, d’organisation, de système d’information, de procédures, différents les uns des autres. À cela, il faut ajouter aussi la diversité des taux de cotisation, des tarifs de référence, de taux de remboursement, de médicaments remboursables, de contrôle médical, etc. Dans certains pays il existe un seul organisme d’assurance maladie pour le public et le privé, imaginez les gains, l’efficience du système et le poids d’un tel organisme face aux différents protagonistes lors des négociations tarifaires ou autres.
L’assurance maladie de base devrait être gérée par un seul organisme public et l’assurance complémentaire par les assurances et les mutuelles.
Protection sociale et entrepreneuriat féminin
La quasi-totalité des femmes actives occupées en milieu rural et plus de la moitié en milieu urbain n’ont pas de couverture sociale en général ni d’assurance maladie. Les écarts sont énormes. Les grands principes constitutionnels n’ont pas encore été traduits avec efficacité dans la réalité vécue quotidiennement par la femme au Maroc. Elle subit toutes les difficultés énumérées dans la première partie, en plus de celles propres à la femme. Les études spécifiques et détaillées sont assez rares et incomplètes. L’intégration de la dimension «Genre» dans les statistiques émanant des organismes publics et privés ne fait pas l’objet d’un suivi contraignant.
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